La RDC expérimente actuellement une
confluence de facteurs économiques qui nécessitent une vision et des méthodes
différentes de celles actuellement en place afin de jeter les jalons d’un réel
développement dans la durée.
Il y a un besoin de recentrer les actions menées sur des solutions et des capacités à long terme malgré la nécessité de l’action immédiate et à court terme actuellement menée. Trois facteurs peuvent aider à comprendre l’importance et la nécessité de cette politique à long terme : La productivité et le niveau de revenus général (ou niveau de création de richesse).
Deux concepts clés
Facteur court-terme : La création de richesse
Ce concept englobe la rémunération des
activités transactionnelles qui s’opèrent dans une économie. Deux facteurs clés
influent sur cette donne : la consommation et le crédit. Comme le nom l’indique, la consommation
englobe les dépenses opérées par les agents économiques (individus et
entreprises) pour l’utilisation des biens mis à leur disposition.
Le crédit quant à lui contribue à
l’expansion de la consommation (et donc des revenus) en créant un complément ou
un surplus de liquidité disponibles pour les agents économiques.
Vu que les dépenses des uns sont les revenus des autres, une croissance globale de la consommation entraine une augmentation des revenus et donc crée naturellement de la richesse.
Facteur long-terme : Productivité de l’économie
Elle peut être comprise comme le
niveau d’augmentation de la valeur ajoutée tirée des richesses créées par le
processus ci-haut décrit. La productivité est donc créée par l’effet
d’entrainement d’une chaine de valeur des divers segments de l’économie qui
étendent le niveau de développement à un nombre croissant de secteurs de la société. Une réelle diversification
des flux transactionnels s’opère alors.
En RDC, ce processus de création de
valeur ne s’opère quasiment pas. Cela explique le très faible niveau de
développement socio-économique malgré des indicateurs de croissance du produit
intérieur brut.
Les causent sont connus : Une économie de rente, principalement basée sur le trading de nos matières premières (elles-mêmes extrêmement sous-exploitées par rapport aux potentiels installés) pour une très faible valeur ajoutée locale, un manque criant d’infrastructure de base pouvant booster la diversification économique, un ralentissement croissant du renouvellement des cerveaux, des indicateurs sociaux et sanitaires en constante baisse qui freinent l’adoption d’une culture du travail.
On comprend des deux concepts ci-haut qu’une croissance mesurée et constante des facteurs courts termes entrainent inexorablement une courbe de productivité sur le long terme.
Outils inefficients
Les gouvernements et les Banques centrales utilisent généralement un mélange d’investissements publics, d’outils de politique monétaires (à travers les taux d’intérêts) et de politique fiscale incitative permettant d’influer sur le niveau de la consommation et sur le crédit.
La RDC est dans une situation de recouvrement fiscal défaillant qui bloque tout outils d’incitation fiscale d’une part et de dollarisation de l’économie qui bloque les outils d’incitation monétaire d’autre part étant donné que la banque centrale est dans l’incapacité de fournir aux institutions financières locales des dollars américains en volume suffisant.
L’investissement public reste donc le seul outil susceptible de produire des résultats palpables. La difficulté rencontrée ici vient du faible niveau actuel des finances publiques; les revenus de l’état eux -même découlant du niveau de la consommation via le système fiscal défaillant.
Une série d’investissements publics productifs et rémunérateurs permettraient de booster le niveau de la consommation et de fournir aux finances publiques les moyens d’entreprendre des réformes visant à régler les deux problèmes qui la mettent en situation d’incapacité à savoir la dollarisation et le faible niveau de discipline fiscale.
Ces investissements ne peuvent donc être financés que par la dette.
Attractivités
La RDC a bénéficié en 2010 de l’annulation d’une majeure partie de sa dette publique dans le cadre de l’initiative PPTE qui lui a permis de réduire son ratio d’endettement à environ 20% classant la RDC dans le top 10 des pays les moins endettés du monde en 2017.
Cela laisse donc une marge considérable d’emprunt par rapport au niveau de revenu que l’économie est déjà capable de générer.
L’attractivité
théorique sur papier de la RDC n’est plus à démontrer. Le pays est capable de
démontrer le retour sur investissement d’une émission obligataire basée sur la
projection future de ces revenus grâce à des investissements ciblés dans des
secteurs clés tels que l’énergie, le transport ou la restructuration
d’entreprises génératrices de revenus.
Ces secteurs se doivent d’assurer des flux additionnels aux flux existants qui sont déjà utilisés par les gouvernements, institutions et autres entreprises publiques pour lever des fonds sur le marché bancaire local afin de faire face à des besoins de fonctionnements et d’investissements à court et moyen terme.
Défis
Deux problèmes se posent cependant de façon persistante, celui du niveau de collecte fiscale et de la dépendance des recettes budgétaires au secteur minier.
La RDC a un très faible niveau de collecte de ses recettes fiscales. En outre, ces recettes budgétaires sont très sensibles à la production minière et à sa profitabilité. Au cours de la décennie 90, ce secteur concentrait déjà 20 à 40 % des revenus budgétaires du pays. Ce pourcentage n’a pas énormément évolué puisqu’il se situe à environ 35% de nos jours, malgré des dépenses budgétaires accrues en raison de plusieurs facteurs dont l'augmentation de la population et le très faible taux de maintenance des infrastructures de base.
Ce
problème structurel rend donc difficile une levée de fonds sous la forme
d’emprunt obligataire souverain.
Les levées de fonds devront être arrangées sous la forme de financements structurés autour d’entités publiques productrices de flux de trésoreries propres ou sous la forme d’emprunt obligataire émis par des Fonds commun de créances (SPV) mises en place pour la réalisation de projets rémunérateurs. Ces structurations de crédits seront arrangées principalement sur les marchés obligataires ou par les syndicats de banques privées.
La problématique des conditions de financement ne peut cependant être éludée. Depuis les années 70 et les premiers emprunts d’envergure de l’économie congolaise, les conditions d’octroi de prêts auxquels le pays a dû faire face ont toujours été relativement défavorables en comparaison aux économies à revenus similaires. Un emprunt auprès du secteur privé implique donc un poids relativement élevé du service de la dette qu’il sera important de mesurer par rapport au niveau de productivité de l’emprunt dans l’économie.
L’aspect du risque de change est également à considérer. Le service de la dette constitue un poids non négligeable sur les réserves de change à l’instar des emprunts majeurs des années 70 effectués en euromonnaie et dont les fluctuations de taux de change avaient contribués aux difficultés de remboursements de l’époque.
Les solutions de levée de fonds auprès des préteurs institutionnels restent attractives du point de vue des conditions d’octroi. Ces financements seraient d’autant plus intéressants qu’ils cibleraient des secteurs clés chers à chaque préteur institutionnel selon sa mission. Il se poserait cependant le problème de la disponibilité de fonds au vu la taille des investissements à réaliser en RDC. Aussi, ce cantonnement aux prêteurs institutionnels empêcherait l’amélioration du profil de risque de la RDC souillé par des années d’arriérés de service de dettes vis-à-vis des financiers privés. Un historique plus attrayant ouvrirait la porte à une diversification des sources de financement dont souffrent un certains nombres de pays d’Afrique sub-saharienne.
Quelques références
L’exemple le plus frappant à l’heure actuelle est celui du Bénin, qui pour son premier emprunt obligataire a levé EUR 500 million sur les marchés Européens, à un taux attractif de de 5,75% et souscrit à 250%. Cette prouesse a été réalisée grâce à un certain nombre de réformes structurelles entreprises sur les 3 années précédant leur levée de fonds et dont les résultats ont constitué la base de l’argumentaire Béninois auprès des investisseurs.
La structuration de la dette Angolaise est également
intéressante. Celle-ci a été arrangée à travers un SPV constitué de l’état
Angolais et d’une Banque privée,
émettrice d’un emprunt obligataire souscrit sur le marché de la dette et
remboursé par les paiements émanant du trésor Angolais. Cette structure peut être
une option pour une première émission ou les marchés pourraient se montrer
sceptiques sur la capacité de remboursement de la RDC. La prime au taux d’intérêt serait bien entendu
plus importante que pour une émission directe, mais permettra de créer un
certain niveau d’attractivité à l’emprunt.
Belle analyse et très pertinente. La situation de faible taux d endettement de la RDC est largement favorable au recourt à l emprunt, idée soutenue aussi par le prof Albert tchempa que je partage.
ReplyDeleteMerci d'avoir pris le temps de la lecture et de votre commentaire. Vulgariser cette idée pourrait peut être amener à sa réalisation.
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