La crise liée à la pandémie du coronavirus a plongé le monde dans une ère d’incertitude sans égal. Pour la première fois depuis plusieurs décennies, le monde a vécu ce à quoi pourrait ressembler un arrêt complet de la machine économique. Cependant, pendant ces temps moroses, les fondamentaux qui règlent le secteur porteur de la RDC, à savoir le secteur minier et la production Cuivre-Cobalt, ne semblent pas avoir été affectés outre mesure.
Cette ambigüité interpelle sur la soutenabilité de la bonne performance de
ce secteur et de ses cours, ainsi que de l’impact sur l’économie Congolaise.
Production soutenue
Avec une production de 765 000 tonnes de cuivre à Juin 2020 soit une
croissance de 14% par rapport à Juin 2019, la filière Cuivre-Cobalt se porte relativement bien
en RDC. Ce résultat a été notamment réalisé du fait de la forte réduction de
mouvements à l’intérieur des sites de production dans le cadre
des mesures sanitaires pour lutter contre la Covid 19. Malgré les tensions
sociales engendrées par ces mesures de confinement au plus fort de la courbe de
contamination, la productivité n’a été que faiblement entamée.
Envolée des cours
Depuis le début de l’année 2020, les cours du cuivre vacillent entre 6200
USD et 6500 USD la tonne. Ce niveau des prix permet aux entreprises
minières de générer des marges relativement confortables lorsque l’on sait que
le cout moyen de production de la filière se situe entre USD 3000 et USD 4000 dollars la tonne.
Cependant une analyse approfondie nous dirige vers deux facteurs qui permettraient
de percer la dichotomie entre la situation préoccupante que connait actuellement
l’économie mondiale et cette embellie qui semble s’installer dans la durée. Ces facteurs de soutenabilité
sont les fondamentaux de l’économie et les attentes
des marchés financiers. Les fondamentaux sont essentiellement fonction de la loi
de l’offre et de la demande pendant que les attentes des marchés sont notamment
fonction du niveau de liquidité globale et de la réaction des acteurs
financiers à divers évènements du paysage économique.
Facteurs de soutenabilité
Il ressort de l’analyse des fondamentaux du cuivre que l’amélioration de
son prix est liée à des facteurs autres que sa demande. En effet, le faible
niveau de production des principaux producteurs que sont le Chili et le Pérou en période de confinement, a créé un déficit de l’offre qui maintient le niveau des cours. C’est
précisément là où se trouve la fragilité actuelle du métal rouge. La demande permet de soutenir un niveau de
prix de façon beaucoup plus durable car elle relève de fondamentaux économiques
beaucoup plus solides dans le temps. Comparativement, l’offre dépend d’éléments
à court terme principalement liés aux facteurs et aux outils de production. Il
est donc plausible d’anticiper un retournement de situation si les cours ne
changent pas de facteurs de soutenabilité
avant la relance des activités dans le reste
du monde.
L’observation de l’évolution
des marchés financiers révèle une seconde réalité qui affecte les cours. Depuis
le début de la crise sanitaire, les principales économies mondiales se sont
lancées dans une série d’injection de liquidité afin de booster la
consommation. Sous la forme de rachat d’actif publics par les banques
centrales, de subventions fiscales ou encore de financements directs aux
consommateurs, il est estimé qu’un montant équivalent à 6000 milliards de Dollars devrait être injecté dans l’économie mondiale. En plus de la liquidité
injectée, cette politique d’assouplissement quantitatif a créé une onde d’optimisme
qui a envoyé à la hausse les principaux marchés financiers du globe, impactant ainsi
les cours du cuivre.
La fragilité de cette position devient apparente dans l’optique d’un retour
aux fondamentaux d’une demande en berne dans l’après Covid. Les cours
repartiraient subitement à la baisse lorsque les acteurs économiques se seront
rendu compte qu’ils ne peuvent pas continuer très longtemps à tenir des positions
dont personne ne veut.
Seconde vague de liquidité
Les fonds injectés dans l’économie mondiale jusqu’à présent sont
essentiellement destinés à maintenir à flot les secteurs impactés pendant la
période de faible demande de biens et services que nous vivons actuellement. Une
seconde vague de liquidité est à anticiper au moment où le monde aura quitté le
chevet des patients du Covid-19 et qu’il s’agira de faire l’inventaire des
dégâts de la bataille; Il faudra de nouveau passer au porte-monnaie pour, cette
fois-là, relancer la machine.
Le candidat Démocrate à la présidence américaine, Joe Biden, a d’ores et
déjà inclus cette deuxième vague à l’ordre du jour de ses décisions économiques
s’il est porté à la maison blanche en novembre prochain. Cette masse de liquidité
dont une bonne partie sera empruntée pourrait également accélérer une situation
d’endettement global excessif sans pour autant réussir à créer les pressions
inflationnistes tant attendues depuis la crise de 2008. Ce scénario, couplé à
des taux d’intérêts déjà au rabais, alimente notamment les prédictions d’une
très prochaine grande
récession à l’échelle mondiale.
La seule bonne nouvelle pour le cuivre Congolais dans ce sombre tableau est
le niveau relativement satisfaisant de la reprise Chinoise. En effet, la Chine a réussi à amortir l’impact
du pétrin Covid avec une injection modérée de liquidité comparativement aux
crises précédentes (le plan de relance Chinois, à 700 milliards de Dollars, représente
moins de la moitié de celui des états unis). Cela en dit long sur la capacité
d’absorption des chocs que présente l’économie Chinoise qui sera très
certainement l’élément catalyseur de la sortie de crise à l’instar de 2008.
Défis
Dans l’hypothèse d’une récession, les prix des métaux en général et ceux du
cuivre en particulier ne seraient pas épargnés. L’économie Congolaise, dans
laquelle le secteur minier représente près de 35% des revenus de l’état sans
compter sa chaine de valeur directe, serait naturellement impactée.
Il serait donc important de poser le débat d’un certain nombre de mesures qui permettraient de créer une réelle capacité d’absorption des chocs économiques en RDC.
Macro-économie :
Au niveau macro-économique l’essentiel des
actions viserait à se réapproprier les outils de la relance.
La dé-dollarisation de l’économie en est un
point majeur. Ce processus permettrait, entre autre, de
faire repartir la machine économique par des moyens de relance endogènes dont
il serait possible de maitriser les cycles. La dollarisation est une situation
d’autant plus handicapante qu’en temps de crise, les pays présentant des
passifs en monnaies étrangères rencontrent généralement des difficultés de
remboursement plus importantes.
La refonte du système fiscal est également
primordiale. En tant de crise, un système fiscal déficient devient doublement
handicapant car au-delà du fait qu’il produit encore moins de revenus à l’état,
son inefficience empêche de booster la consommation vu qu’il a perdu son lien
avec l’activité économique. Cette refonte passe non seulement par
l’établissement d’un niveau de taxation optimal mais par le renforcement des
capacités des entités de contrôles.
La création de véhicules de croissance demeure
une initiative de premier ordre. Un certain nombre de secteurs permettent d’avoir
un impact rapide sur le niveau de la consommation d’une économie en y injectant
directement de la liquidité. Lorsque ceux-ci sont inexistants ou défaillants,
comme c’est le cas en RDC, toute initiative de relance prend le temps de la
création ou de la refonte de ces secteurs. L’énergie, la métallurgie de
produits à valeur ajoutée, le transport, la construction ou les différentes
disciplines de l’ingéniorat permettent notamment de relayer de la croissance
dans le reste de l’économie.
Micro-économie :
Une réelle politique de l’emploi est un
must. Le taux de chômage est très souvent aux abonnés absents des indicateurs
économiques fréquemment débattus sur la RDC. La faute à un manque de données ou
à un manque de focus sur la question. Des objectifs de création d’emplois
devraient être au centre de toutes les politiques sectorielles du pays en
réfléchissant sur l’innovation, la formation et l’éducation en général.
Une réelle politique de l’entreprenariat
aiderait le point précédent. L’entreprenariat
fait vivre une très grande part de la population Congolaise bien qu’étant pour
la plus grande part informel. L’économie aurait énormément à gagner dans la
canalisation de ces énergies créatives et très souvent innovantes.
Une réelle amélioration du « doing
business » demeure une préoccupation. Malgré la vulgarisation des
campagnes liées au climat des affaires, les avancées restent mitigées. Cette initiative
est cependant un des piliers du développement de beaucoup d’économies
africaines (le Rwanda en est certainement l’exemple le plus plausible) et même
mondiales. La Chine a fait de l’amélioration de sa lourdeur administrative un
des points focaux du « Xinomics » ; la nouvelle politique
économique du Président Xi. C’est dire
combien ce qui apparait désormais comme un slogan parmi tant d’autre dans le
paysage économique Congolais, est en fait un des points focaux du développement
d’un certain nombre d’économies performantes.
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